vive, alerte, trouvait des réparties, des réflexions excitant le rire, avait une grâce à elle, qui la faisait adorer. Malgré sa grande dévotion, bien qu’elle passât des journées en prière, elle n’affichait pas une religion revêche, sans outrance de zèle pour les autres, tolérante et pitoyable. Aucune sainte fille, en somme, n’était plus femme, avec des traits propres, une personnalité bien nette, charmante dans sa puérilité même. Et ce don de l’enfance qu’elle conservait, cette innocence simple de l’enfant qu’elle était restée, faisait encore que les enfants la chérissaient, en reconnaissant toujours en elle une des leurs : tous couraient à elle, sautaient sur ses genoux, lui prenaient le cou entre leurs petits bras ; et le jardin retentissait alors de parties folles, de courses, de cris ; et ce n’était pas elle qui courait le moins, qui criait le moins, si heureuse de redevenir une fillette pauvre, ignorée, comme aux jours lointains de Bartrès ! Plus tard, on raconta qu’une mère avait amené au couvent son enfant paralytique, pour que la sainte le touchât et le guérît. Elle sanglota si fort, que la supérieure finit par consentir à la tentative. Mais, comme Bernadette se révoltait, indignée, quand on lui demandait des miracles, on ne la prévint pas, on l’appela seulement pour porter à l’infirmerie l’enfant malade. Et elle porta l’enfant, et quand elle le posa par terre, l’enfant marcha. Il était guéri.
Ah ! que de fois Bartrès, et son enfance libre, derrière ses agneaux, et les années vécues par les collines, par les grandes herbes, par les bois touffus, durent revivre en elle, aux heures où elle rêvait, lasse d’avoir prié pour les pécheurs ! Nul ne descendit alors dans son âme, nul ne peut dire si d’involontaires regrets ne firent pas saigner son cœur meurtri. Elle eut, un jour, une parole que ses historiens rapportent, dans le but de rendre sa passion plus touchante. Cloîtrée loin de ses montagnes, clouée