Page:Zola - Les Trois Villes - Lourdes, 1894.djvu/530

Cette page n’a pas encore été corrigée

Et, les yeux dans les siens, de son air calme et fraternel :

— Adieu, monsieur Ferrand.

Il sourit encore, tandis qu’une émotion infinie mouillait ses yeux. Le son tremblé de sa voix dit l’inoubliable voyage, la joie de l’avoir revue, le souvenir d’éternelle et divine tendresse qu’il emportait.

— Adieu, ma sœur.

Madame de Jonquière parlait d’aller à son wagon avec sœur Claire des Anges et sœur Hyacinthe. Mais celle-ci lui assura que rien ne pressait, puisqu’on amenait à peine les malades. Elle la quitta, emmena l’autre sœur, promit de veiller à tout ; et même elle voulut absolument la débarrasser de son petit sac, en lui disant qu’elle le retrouverait à sa place. De sorte que ces dames continuèrent à se promener, à causer gaiement entre elles, sur le large trottoir, où il faisait si doux.

Cependant, Pierre, qui, les yeux sur la grande horloge, regardait marcher les minutes, commençait à être surpris de ne pas voir Marie arriver avec son père. Pourvu que M. de Guersaint ne se perdît pas en route ! Et il guettait, lorsqu’il aperçut M. Vigneron exaspéré, poussant furieusement devant lui sa femme et le petit Gustave.

— Oh ! monsieur l’abbé, je vous en prie, dites-moi où est notre wagon, aidez-moi à y fourrer mes bagages et cet enfant… Je perds la tête, ils m’ont jeté hors de mon caractère…

Puis, devant le compartiment de seconde classe, il éclata, saisissant les mains du prêtre, au moment où celui-ci allait monter le petit malade.

— Vous imaginez-vous cela ! ils veulent que je parte, ils m’ont répondu que, si j’attendais à demain, mon billet de retour ne serait plus valable !… J’ai eu beau leur conter l’accident. N’est-ce pas ? ce n’est déjà pas si drôle de rester avec cette morte, pour la veiller, la mettre en bière, l’emmener demain, dans les délais voulus… Eh bien ! ils prétendent