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d’un bras à la taille. Ils ne faisaient qu’un, des larmes lentes se mirent à ruisseler sur leurs visages extasiés, souriant d’une félicité surhumaine ; tandis qu’ils ne bégayaient plus ensemble que des paroles désordonnées de gratitude.

— Ô Jésus, merci ! ô sainte Mère de Jésus, merci !… Nous vous aimons, nous vous adorons… Vous avez rajeuni le meilleur sang de nos veines, il est à vous, il brûle pour vous… Ô Mère toute-puissante, ô divin Fils bien-aimé, c’est une fille et c’est un père qui vous bénissent, qui s’anéantissent de joie à vos pieds…

Cet embrassement de ces deux êtres, heureux après tant de jours noirs, ces bégayements de leur bonheur comme trempé de souffrance encore, toute cette scène était si touchante, que Pierre, de nouveau, fut gagné par les larmes. Mais c’étaient des larmes douces à présent, qui apaisaient son cœur. Ah ! la triste humanité ! que cela était bon, de la voir un peu consolée et ravie ! et qu’importait, si ses grandes félicités de quelques secondes lui venaient de l’éternelle illusion ! L’humanité entière, l’humanité pitoyable, sauvée par l’amour, n’était-elle pas chez ce pauvre homme, tout d’un coup sublime, parce qu’il retrouvait sa fille ressuscitée ?

Debout, un peu à l’écart, sœur Hyacinthe pleurait également, le cœur très gros, gros d’une émotion humaine qu’elle n’avait jamais ressentie, elle qui ne s’était connu d’autres parents que le bon Dieu et la sainte Vierge. Un silence régna dans cette chambre frissonnante d’une telle fraternité trempée de pleurs. Et ce fut elle qui parla la première, lorsque le père et la fille, brisés d’attendrissement, se relevèrent enfin.

— Maintenant, mademoiselle, il faut vite, vite nous dépêcher, pour rentrer à l’Hôpital.

Mais tous se récrièrent. M. de Guersaint voulait garder sa fille avec lui, et Marie avait des yeux ardents de