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pouvait se lasser devant cette royale ordonnance, ces grandes lignes qui se découpaient sur le bleu, ces toits superposés, cette masse énorme dont la solidité défiait les siècles. Mais, lorsqu’il fermait les yeux, il évoquait surtout la façade, le clocher, dans un ravissement d’orgueil : en bas, le porche à trois travées, la travée de droite et la travée de gauche, dont les toitures de pierre formaient terrasse, tandis que le clocher, naissant de la travée centrale, s’élançait au milieu, d’un jet puissant. Là aussi, les colonnes engagées dans les pieds-droits supportaient des archivoltes simplement moulurées. Contre le pignon, à la pointe d’un pinacle, une statue de Notre-Dame de Lourdes se trouvait sous un dais, entre les deux baies hautes de la nef. Au-dessus, d’autres baies s’ouvraient encore, que garnissaient les abat-son, fraîchement peints. Les contreforts partaient du sol, aux quatre angles, s’amincissaient en montant, d’une légèreté forte, jusqu’à la flèche, une hardie flèche de pierre, flanquée de quatre clochetons, ornée également de pinacles, envolée et perdue en plein ciel. Et il lui semblait que c’était son âme de prêtre fervent qui avait grandi, qui s’était élancée avec cette flèche, pour témoigner de sa foi au travers des âges, là-haut, tout près de Dieu.

D’autres fois, une vision l’enchantait davantage encore. Il croyait voir l’intérieur de son église, le jour de la première messe solennelle qu’il y célébrerait. Les vitraux jetaient des feux comme des pierreries, les douze chapelles des bas côtés rayonnaient de cierges. Et il était au maître autel de marbre et d’or, et les quatorze colonnes de la nef, en marbre des Pyrénées d’un seul bloc, dons magnifiques venus des quatre coins de la chrétienté, se dressaient, supportant la voûte, que les voix grondantes des orgues emplissaient d’un chant d’allégresse. Un peuple de fidèles se pressait là, agenouillé sur les