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par la masse même, la masse énorme des prières. Les prêtres disaient qu’il fallait donner à Dieu les expiations exigées par les péchés de la France, et que lorsque la somme de ces expiations serait assez forte, la France cesserait d’être frappée. Quelle croyance dure à la nécessité du châtiment ! Quelle féroce imagination du pessimisme le plus noir ! Comme la vie devait être mauvaise, pour qu’une pareille imploration, un tel cri de misère, physique et morale, montât vers le ciel !

Mais, au milieu de cette tristesse sans bornes, Pierre sentit une pitié profonde le gagner. Ah ! cette humanité misérable, elle le bouleversait, réduite à cet excès de malheur, si nue, si faible, si abandonnée, qu’elle renonçait à sa raison, pour ne plus mettre le bonheur possible que dans l’ivresse hallucinée du rêve. Des larmes de nouveau emplirent ses yeux, il pleurait sur lui-même, sur les autres, sur tous les pauvres êtres torturés, qui ont le besoin de stupéfier leur mal, de l’endormir, afin d’échapper aux réalités de ce monde. Il lui semblait encore entendre la foule entassée, agenouillée devant la Grotte, jetant au ciel la supplication enflammée de sa prière, des foules de vingt et trente mille âmes d’où montait une ferveur de désir qu’on voyait fumer sous le soleil, comme un encens. Puis, en dessous de la Crypte même, dans l’église du Rosaire, s’embrasait une autre exaltation de la foi, les nuits entières passées au paradis de l’extase, les délices muettes des communions, les ardents appels sans paroles, où toute la créature se consume, brûle et s’envole. Puis, comme si les cris jetés devant la Grotte, comme si l’adoration perpétuelle au Rosaire ne devaient pas suffire, cette clameur d’ardente requête recommençait autour de lui, sur les murs de la Crypte ; mais, là, elle s’éternisait dans le marbre, elle ne cesserait plus de crier la souffrance humaine, jusqu’au lointain des âges ; c’était le marbre, c’étaient les murs qui priaient, envahis du frisson