voulait tout, dévorait tout ; et les choses allèrent à ce point, que des billets de cinq cents francs mis dans le tronc, à la Basilique, furent gardés : on dépouillait le tronc, on volait la paroisse. Mais le curé, dans sa passion pour l’église grandissante, qui était sa fille, résistait avec violence, aurait donné son sang. Il avait d’abord traité au nom de la fabrique ; puis, quand il ne sut comment payer, il traita en son nom personnel. Sa vie n’était plus que là, il s’épuisa en efforts héroïques. Sur les quatre cent mille francs promis, il n’avait pu en donner que deux cent mille ; et le conseil municipal s’entêtait à ne pas verser les cent mille francs votés, avant que l’église fût couverte. C’était aller contre les intérêts évidents de la ville. Le père Sempé, à ce qu’on racontait, agissait secrètement auprès de l’entrepreneur. Brusquement, il triompha, les travaux furent arrêtés.
Dès lors, ce fut l’agonie. Le curé Peyramale, ce montagnard aux épaules larges, à la face léonine, frappé au cœur, chancela et s’abattit, ainsi qu’un chêne foudroyé. Il s’alita, il ne se releva plus. Des histoires couraient, on disait que le père Sempé avait tâché de s’introduire à la cure, sous un pieux prétexte, pour être certain que son adversaire redouté était bien blessé mortellement ; et on ajoutait qu’on avait dû le chasser de cette chambre douloureuse, où sa présence était un scandale. Puis, quand le curé fut mort, abreuvé d’amertume, vaincu, on put voir le père Sempé triomphant aux obsèques, dont on n’avait point osé l’écarter. On prétendit qu’il y afficha une joie abominable, le visage rayonnant de son triomphe. Enfin, il était donc débarrassé du seul homme qui lui faisait obstacle, dont il craignait la légitime autorité ! Il ne serait plus forcé de partager avec personne, maintenant que les deux ouvriers de Notre-Dame de Lourdes se trouvaient supprimés, Bernadette au couvent, l’abbé Peyramale dans la terre. La Grotte n’était plus qu’à lui,