la lueur mystérieuse des milliers de cierges, dont le nombre croissait toujours.
Marie eut un soupir étouffé d’admiration ; et elle ne trouvait pas de phrases, elle répétait :
— Que c’est beau, mon Dieu, que c’est beau !… Voyez donc, Pierre, que c’est beau !
Mais, depuis que la procession défilait à quelques pas d’eux, elle n’était plus seulement une marche rythmée d’étoiles que nulle main ne portait. Dans la nuée lumineuse, maintenant, ils distinguaient les corps, ils reconnaissaient par moments, au passage, les pèlerins qui tenaient les cierges. D’abord, ce fut la Grivotte, qui avait voulu être de la cérémonie, malgré l’heure tardive, exagérant sa guérison, répétant qu’elle ne s’était jamais mieux portée ; et elle gardait son allure exaltée et dansante, sous la nuit fraîche qui lui donnait un frisson. Puis, les Vigneron parurent, le père en tête, avec son cierge qu’il portait très haut, suivi de madame Vigneron et de madame Chaise, traînant leurs jambes lasses ; tandis que le petit Gustave, exténué, tapait le sable de sa béquille, la main droite couverte de gouttes de cire. Tous les malades valides étaient là, Élise Rouquet, entre autres, qui passa comme une apparition de damnée, avec sa face nue et rouge. Beaucoup riaient, la petite miraculée de l’année précédente, Sophie Couteau, s’oubliait, jouait avec son cierge comme avec un bâton. Des têtes, des têtes toujours se succédaient, des femmes surtout, bassement communes, parfois d’une expression superbe, qu’on entrevoyait une seconde et qui se noyaient, sous l’éclairage fantastique. Et cela ne finissait pas, et il en venait d’autres sans cesse, et ils remarquèrent encore une petite ombre noire très discrète, madame Maze, qu’ils n’auraient point reconnue, si elle n’avait levé un instant sa face pâle, inondée de larmes.
— Regardez, expliqua Pierre à Marie, voici les premières