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VI

La chasse aux amours


Alors, ce fut une vraie déroute, une course sans trêve ni repos, une épouvante de toutes les minutes. Poussés à droite et à gauche par leur effroi, croyant sans cesse entendre derrière eux des galops de chevaux, passant les nuits à courir les grands chemins et les jours à trembler dans de sales chambres d’auberge, les fugitifs traversèrent à plusieurs reprises la Provence, allant devant eux et revenant sur leurs pas, ne sachant où trouver une retraite inconnue, perdue au fond de quelque désert.

En quittant Lambesc, par une terrible nuit de mistral, ils montèrent vers Avignon. Ils avaient loué une petite charrette ; le vent aveuglait le cheval. Blanche frissonnait dans sa misérable robe d’indienne. Pour comble de malheur, ils crurent voir de loin, à une porte de la ville, des gendarmes qui regardaient les passants au visage. Effrayés, ils retroussèrent chemin, ils revinrent à Lambesc qu’ils ne firent que traverser.

Arrivés à Aix, ils n’osèrent y rester, ils résolurent de gagner la frontière à tout prix. Là, ils se procureraient un passeport, ils se mettraient en sûreté. Philippe, qui connaissait un pharmacien à Toulon, décida qu’ils passeraient par cette ville. Il espérait que son ami pourrait lui faciliter la fuite.

Le pharmacien, un gros garçon réjoui qui se nommait Jourdan, les reçut à merveille. Il les cacha dans sa