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une autre forme, toutes les joies tendres de l’amour. Une affection suffit pour emplir une existence, et la chère petite fut pour elle cette affection nécessaire et consolante.

Pendant cinq ans, elle vécut ainsi en tête à tête avec Jeanne. Elle ne souffrit personne auprès d’elle, voulut être sa servante et son amie, son guide en toutes choses. Elle la promenait, jouait avec elle, lui donnait les premières leçons du cœur et de l’intelligence. Sa vie n’eut plus qu’un but, elle n’exista plus que pour et que par son enfant.

Que de rêves elle fit pendant les longues heures de cette solitude volontaire ! Tandis que Jeanne jouait à ses pieds, elle l’étudiait déjà dans les premiers bégaiements de ses jeux. Elle voulait qu’elle eût l’âme droite. Elle s’était promis de lui faciliter le bonheur, d’être sans cesse à son côté, comme un conseil et comme un exemple.

Puis, son imagination aidant, elle la voyait mariée et heureuse. Le songe d’amour qu’elle