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LES REPOUSSOIRS.

« Mon article de toilette est d’une simplicité extrême et d’un effet certain. Je n’ai besoin que de le décrire, madame, pour que vous en compreniez tout de suite le mécanisme.

« N’avez-vous jamais vu une pauvresse auprès d’une belle dame en soie et en dentelle, qui lui donnait l’aumône de sa main gantée ? Avez-vous remarqué combien la soie luisait, en se détachant sur les haillons, combien toute cette richesse s’étalait et gagnait d’élégance, à côté de toute cette misère ?

« Madame, j’ai à offrir aux beaux visages la plus riche collection de visages laids qu’on puisse voir. Les vêtements troués font valoir les babils neufs. Mes faces laides font valoir les jolies faces.

« Plus de fausses dents, de faux cheveux, de fausses gorges ! plus de maquillage, de toilettes dispendieuses, de dépenses énormes en fards et en dentelles ! De simples Repoussoirs que l’on prend au bras et que l’on promène par les rues, pour rehausser sa beauté et se faire regarder tendrement par les messieurs !