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LES REPOUSSOIRS.

ment une prise et se recueillait ; puis, pour mieux voir, il faisait tourner la marchandise, l’examinant sur toutes les faces ; parfois même il se levait, touchait les cheveux, examinait la face, comme un tailleur palpe une étoffe, ou encore comme un épicier s’assure de la qualité de la chandelle ou du poivre. Lorsque la laideur était bien accusée, lorsque le visage était stupide et lourd, Durandeau se frottait les mains ; il félicitait le courtier, il aurait même embrassé le monstre. Mais il se défiait des laideurs originales : quand les yeux brillaient et que les lèvres avaient des sourires aigus, il fronçait le sourcil et se disait tout bas qu’une pareille laide, si elle n’était pas faite pour l’amour, était faite souvent pour la passion. Il témoignait quelque froideur au courtier, et disait à la femme de repasser plus tard, lorsqu’elle serait vieille.

Il n’est pas aussi aisé qu’on peut le croire de se connaître en laideur, de composer une collection de femmes vraiment laides, ne pouvant nuire aux belles filles. Durandeau fit preuve de