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Ce regard, qui rencontra le mien pendant une seconde, me conta une longue histoire d’amour et de regrets. Il y avait, dans ces yeux pâles, une tristesse tendre, tous les désirs de la jeunesse et toutes les lassitudes du vieil âge. Les nuits de plaisir avaient rougi les paupières, et les cils manquaient, brûlés par les larmes chaudes de la passion. Elle devait aimer encore, la pauvre vieille aux yeux bleus, n’être pas lasse, regretter les années rapides. Et elle tremblait au soleil, songeant aux baisers ardents d’autrefois.

Je crus avoir pénétré, jusqu’au cœur, une de ces créatures mystérieuses. Les yeux avaient parlé, et je me dis que, maintenant, je savais d’où venaient les vieilles aux yeux bleus qui, dans les rues, jettent parfois encore aux jeunes hommes des regards dévorants.

Elles viennent des amours de nos pères.