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II

Les garçons de vingt ans suivent les jeunes mollets qu’un coup de vent montre dans leur blancheur. Moi, j’aime à suivre les vieilles aux yeux bleus qui vont tout droit devant elles, sans tourner la tête, d’un pas régulier de somnambule.

Elles sont toujours seules. Elles ne marchent pas comme les belles de seize ans, par bandes, tenant la largeur de la rue, riant à pleine bouche. Elles se montrent isolées, humbles et discrètes, et glissent dans la foule qui ne les voit même pas.

Je les connais toutes, celles des hauteurs du Panthéon et celles des hauteurs de Montmartre. Par les clairs soleils, par les froids secs, dès que j’en vois une, je règle mon pas sur le sien, je me plais à accompagner ce joli petit être si vieux et si délicat. Autrefois, lorsque j’étais encore