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Mais Georges parlait toujours, racontant le long martyre. Il appuyait sur chaque détail, il étalait à nu les misères et les souffrances du pauvre être. C’étaient les douze années de solitude et d’adoration pendant que Jeanne se trouvait au couvent ; c’était l’abnégation entière et complète, l’emploi chez Tellier, la surveillance jalouse au milieu des fièvres du monde, les promenades du Mesnil-Rouge. À mesure qu’il parlait, il s’éclairait lui-même, il s’expliquait tout, il devinait ce que son ami lui avait caché. Sa voix devenait tremblante et ses yeux se mouillaient.

Enfin, Georges parla des lettres. Il avoua la vérité, dépeignit l’amour de Daniel, ouvrit devant Jeanne ce cœur saignant. Et c’étaient eux qui avaient brisé ce cœur sans le savoir ! En récompense de ses dévouements, ils venaient de lui imposer un sacrifice suprême.

Lorsqu’il eut fini, Georges se sentit plus calme. Il releva la tête, il regarda la jeune femme, qui s’était dressée, frémissante.