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car maintenant elle sentait là, dans sa poitrine, une paix, une espérance.

Et elle se disait avec une joie infinie qu’elle était aimée, que son cœur ne mourrait pas de lassitude. Le monde lui paraissait bien loin, à cette heure. Elle voyait, au fond d’une sorte de nuit ces hommes en habits noirs qui passaient dans son salon comme des pantins sinistres. Elle était toute à sa vision, à la pensée de cet amant qui pleurait loin d’elle, qui lui jetait des paroles si passionnées et si consolantes.

Cet amant n’avait pas de corps. Elle le contemplait dans le rêve, elle n’arrêtait pas les contours de cette chère âme. Pour elle, il n’était encore que l’amour. Il était venu comme un souffle qui l’avait soulevée dans la lumière et elle se laissait emporter, sans chercher à connaître la force qui l’enlevait ainsi en plein ciel.

Daniel, pendant huit grands jours, n’osa retourner chez Lorin. Il se faisait mille chimères, il craignait de retrouver Jeanne fiévreuse et il se disait qu’il n’aurait plus alors qu’à mourir.