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Puis, il riait de pitié, car il s’avouait qu’il se mentait, et que c’était son amour seul qui le poussait ainsi à vouloir le bonheur de Jeanne. Il se voyait à nu. L’honnête gardien était devenu un amant passionné qui ne veillait plus que par jalousie sur la femme qu’on lui avait confiée.

Et il serrait son front entre ses mains, il sanglotait, il cherchait avec angoisse à la sauver, à se sauver lui-même.

Puis, comme il ne trouvait rien, il prit une feuille de papier, et se mit à écrire à la jeune femme. Les larmes séchèrent sur ses joues, toute sa fièvre était passée dans sa main, qui courait, rapide.

Pendant deux heures, il ne leva pas la tête, il soulagea son âme. Sa lettre fut un élan d’amour, un flot de tendresse qui brisait les obstacles et qui se répandait largement. Toutes les affections toutes les adorations amassées trouvèrent une issue dans cette confession. Ce misérable se laissa aller à tout dire ; il n’avait même pas conscience de ce débordement ; il s’abandonnait à la force