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comme elle, poussant de petits cris d’effroi. Elle n’était pas effrayée du tout, elle obéissait simplement à Mme Tellier, qu’elle regardait comme souveraine en matière de goût. Puis, peu à peu, ses pieds devenaient fiévreux ; elle pressait le pas, marchant en plein dans la boue, ce qui la faisait rire aux éclats ; et elle recommençait à courir.

La seule joie de la maison était la venue d’un visiteur. Ces jours-là, Mme Tellier rayonnait. Elle tirait les rideaux pour ne plus voir les arbres, et elle se croyait à Paris, causant des mille sottises mondaines, se grisant des senteurs lointaines des soirées. Parfois, lorsqu’elle oubliait de fermer les rideaux et qu’elle venait, en plein bavardage, à jeter un regard sur le large horizon, il lui prenait de véritables peurs : elle se sentait toute petite dans cette immensité, et son orgueil de femme en souffrait.

Jeanne elle-même n’était pas insensible à ces souvenirs qui lui venaient de Paris. Elle restait alors dans la grande salle du Mesnil-