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Elle se jeta avec passion dans le luxe. Elle y contenta toute sa fièvre de jeunesse, dont elle ne savait que faire. Ce fut un emportement, un assouvissement. À certaines heures, elle sentait le vide de la vie qu’elle menait avec sa tante ; mais elle se raillait alors elle-même, se prouvait que rien ne lui manquait, et s’accusait de souhaiter des choses qui n’existaient pas. L’affection n’avait, en effet, jamais existé pour elle.

Alors, elle s’abandonnait. Elle tâchait de se satisfaire par la vanité seule, elle tirait tout le bonheur possible du froissement des belles étoffes de l’admiration de la foule, du bien-être, de la richesse. Et elle croyait vivre.

L’aveugle Daniel ne pouvait pénétrer dans cette âme compliquée et il voyait bien les regards méprisants, mais il n’apercevait pas, tout au fond des yeux, une lueur tendre. Il entendait bien les paroles brèves et rieuses, mais il ne reconnaissait pas les pleurs cachés dans les éclats de joie.