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les romans de pure imagination par les romans d'observation et d'expérimentation.

Certes, je n'entends pas ici formuler des lois. Dans l'état actuel de la science de l'homme, la confusion et l'obscurité sont encore trop grandes pour qu'on se risque à la moindre synthèse. Tout ce qu'on peut dire, c'est qu'il y a un déterminisme absolu pour tous les phénomènes humains. Dès lors, l'investigation est un devoir. Nous avons la méthode, nous devons aller en avant, si même une vie entière d'efforts n'aboutissait qu'à la conquête d'une parcelle de vérité. Voyez la physiologie: Claude Bernard a fait de grandes découvertes, et il est mort en avouant qu'il ne savait rien ou presque rien. A chaque page, il confesse les difficultés de sa tâche, «Dans les relations phénoménales, dit-il, telles que la nature nous les offre, il règne toujours une complexité plus ou moins grande. Sous ce rapport, la complexité des phénomènes minéraux est beaucoup moins grande que celle des phénomènes vitaux; c'est pourquoi les sciences qui étudient les corps bruts sont parvenues plus vite à se constituer. Dans les corps vivants, les phénomènes sont d'une complexité énorme, et de plus la mobilité des propriétés vitales les rend beaucoup plus difficiles à saisir et à déterminer.» Que dire alors des difficultés que doit rencontrer le roman expérimental, qui prend à la physiologie ses études sur les organes les plus complexes et les plus délicats, qui traite des manifestations les plus élevées de l'homme, comme individu et comme membre social? Evidemment, l'analyse se complique ici davantage. Donc, si la physiologie se constitue aujourd'hui, il est naturel que le