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Burle le regarda d’un air surpris. De son côté, le colonel crut devoir présenter quelques observations.

— C’est bien grave, major, la détermination que vous prenez là… Vous n’aviez plus que deux ans pour arriver à la retraite…

Mais, de nouveau, Laguitte lui coupa la parole, en disant d’une voix bourrue :

— Ça me regarde.

— Oh ! parfaitement… Eh bien ! je vais envoyer votre démission, et dès qu’elle aura été acceptée, je fixerai le jour de la rencontre.

Ce dénouement stupéfia le régiment. Qu’avait-il donc dans le ventre, cet enragé de major, à vouloir quand même se couper la gorge avec son vieux camarade Burle ? On reparla de Mélanie et de son beau corps de femme ; tous les officiers en rêvaient maintenant, allumés par cette idée qu’elle devait être décidément très bien, pour emballer ainsi de vieux durs à cuire. Le chef de bataillon Morandot, ayant rencontré Laguitte, ne lui cacha pas ses inquiétudes. S’il n’était pas tué, comment vivrait-il ? car il n’avait pas de fortune, et c’était tout juste s’il mangerait du pain, avec la pension de sa croix d’officier et l’argent de sa retraite, réduite de moitié. Pendant que Morandot parlait, Laguitte,