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ment. Maintenant, la galanterie du major l’inquiétait. Elle tâcha de s’esquiver, lorsqu’il l’invita à prendre quelque chose avec ces messieurs. Mais, comme s’il eût parlé en maître dans la maison, il avait déjà commandé à Phrosine un petit verre d’anisette ; et Mélanie fut forcée de s’asseoir, entre lui et le capitaine. Il répétait, d’un ton cassant :

— Moi, je veux qu’on respecte les dames… Soyons chevaliers français, nom de Dieu ! À la santé de madame !

Burle, les yeux sur sa chope, gardait un sourire embarrassé. Les deux autres officiers, choqués de trinquer ainsi, avaient déjà tenté de partir. Heureusement, la salle était vide. Seuls, les petits rentiers, autour de leur table, faisaient leur partie de l’après-midi, tournant la tête à chaque juron, scandalisés de voir tant de monde et prêts à menacer Mélanie d’aller au Café de la Gare, si la troupe devait les envahir. Tout un vol de mouches bourdonnait, attiré par la saleté des tables, que Phrosine ne lavait plus que le samedi. Étendue dans le comptoir, la petite bonne s’était remise à lire un roman.

— Eh bien ! tu ne trinques pas avec madame ? dit rudement le major à Burle. Sois poli au moins !