Page:Zola - Le Capitaine Burle et 5 autres nouvelles.djvu/245

Cette page a été validée par deux contributeurs.

C’était, en somme, l’anarchie complète, l’armée en révolte contre le pouvoir civil, la religion se faisant la complaisante des jouissances de la bourgeoisie, tout un peuple de cent quatre-vingts habitants se dévorant dans un trou, en face de la mer immense et de l’infini du ciel.

Seul, au milieu de Coqueville bouleversé, Delphin gardait son rire de garçon amoureux, qui se moquait du reste, pourvu que Margot fût à lui. Il la chassait au lacet, comme on chasse les lapins. Très sage, malgré son air fou, il voulait que le curé les mariât, pour que le plaisir durât toujours.

Un soir, Margot leva enfin la main, dans un sentier où il la guettait. Mais elle resta toute rouge ; car, sans attendre la gifle, il avait saisi cette main qui le menaçait, et la baisait furieusement.

Comme elle tremblait, il lui dit à voix basse :

— Je t’aime. Veux-tu de moi ?

— Jamais ! cria-t-elle révoltée.

Il haussa les épaules ; puis, d’un air tranquille et tendre :

— Ne dis donc pas ça… Nous serons très bien tous les deux. Tu verras comme c’est bon.