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qu’un mot à dire, pour l’empêcher d’en jouer.

Le jeune homme éprouvait du reste un respect religieux, quand il s’accoudait à sa fenêtre, tant le développement du jardin et des constructions lui semblait vaste. Dans le pays, l’hôtel était célèbre, et l’on racontait que des étrangers venaient de loin le visiter. Des légendes couraient également sur la richesse des Marsanne. Longtemps, il avait guetté le vieux logis, pour pénétrer les mystères de cette fortune toute-puissante. Mais, pendant les heures qu’il s’oubliait là, il ne voyait toujours que la façade grise et le massif noir des marronniers. Jamais une âme ne montait les marches descellées du perron, jamais la porte verdie de mousse ne s’ouvrait. Les Marsanne avaient condamné cette porte, on entrait par une grille, rue Sainte-Anne ; en outre, au bout d’une ruelle, près des remparts, il y avait une petite porte donnant sur le jardin, que Julien ne pouvait apercevoir. Pour lui, l’hôtel restait mort, pareil à un de ces palais des contes de fée, peuplé d’habitants invisibles. Chaque matin et chaque soir, il distinguait seulement les bras du domestique qui poussaient les persiennes. Puis, la maison reprenait son grand air mélancolique de tombe abandonnée dans le recueillement d’un cimetière. Les marronniers étaient