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XVI



Ce matin-là, il y avait un grand remue-ménage, dans la basse-cour du presbytère. Le boucher des Artaud venait de tuer Mathieu, le cochon, sous le hangar. Désirée, enthousiasmée, avait tenu les pieds de Mathieu, pendant qu’on le saignait, le baisant sur l’échine pour qu’il sentît moins le couteau, lui disant qu’il fallait bien qu’on le tuât, maintenant qu’il était si gras. Personne comme elle ne tranchait la tête d’une oie d’un seul coup de hachette, ou n’ouvrait le gosier d’une poule avec une paire de ciseaux. Son amour des bêtes acceptait très-gaillardement ce massacre. C’était nécessaire, disait-elle ; ça faisait de la place aux petits qui poussaient. Et elle était très-gaie.

— Mademoiselle, grondait la Teuse à chaque minute, vous allez vous faire mal. Ça n’a pas de bon sens, de se mettre dans un état pareil, parce qu’on tue un cochon. Vous êtes rouge comme si vous aviez dansé tout un soir.

Mais Désirée tapait des mains, tournait, s’occupait. La Teuse, elle, avait les jambes qui lui rentraient dans le corps,