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LA FAUTE DE L’ABBÉ MOURET.

au bord de l’horizon, sous l’incendie du soleil. Les bouquets de saules, tout là-bas, semblaient d’or pur, au milieu du grand frisson de la lumière. Des poussières dansantes mettaient aux pointes des gazons un flux de clartés, tandis qu’à certains souffles de vent, passant librement sur cette solitude nue, les herbes se moiraient d’un tressaillement de plantes caressées. Et, le long des prés les plus voisins, des foules de petites pâquerettes blanches, en tas, à la débandade, par groupes, ainsi qu’une population grouillant sur le pavé pour quelque fête publique, peuplaient de leur joie répandue le noir des pelouses. Des boutons d’or avaient une gaieté de grelots de cuivre poli, que l’effleurement d’une aile de mouche allait faire tinter ; de grands coquelicots isolés éclataient avec des pétards rouges, s’en allaient plus loin, en bandes, étaler des mares réjouissantes comme des fonds de cuvier encore pourpres de vin ; de grands bleuets balançaient leurs légers bonnets de paysanne ruchés de bleu, menaçant de s’envoler par dessus les moulins à chaque souffle. Puis c’étaient des tapis de houques laineuses, de flouves odorantes, de lotiers velus, des nappes de fétuques, de crételles, d’agrostis, de pâturins. Le sainfoin dressait ses longs cheveux grêles, le trèfle découpait ses feuilles nettes, le plantain brandissait des forêts de lances, la luzerne faisait des couches molles, des édredons de satin vert d’eau broché de fleurs violâtres. Cela, à droite, à gauche, en face, partout, roulant sur le sol plat, arrondissant la surface moussue d’une mer stagnante, dormant sous le ciel qui paraissait plus vaste. Dans l’immensité des herbes, par endroits, les herbes étaient limpidement bleues, comme si elles avaient réfléchi le bleu du ciel.

Cependant, Albine et Serge marchaient au milieu des prairies, ayant de la verdure jusqu’aux genoux. Il leur semblait avancer dans une eau fraîche qui leur battait les