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LES ROUGON-MACQUART.

poursuivaient. Albine, tout en filant sous les arbres, allongeait la main, croquait une poire verte, s’emplissait la jupe d’abricots. Puis, dans certaines cachettes, elle avait des trouvailles qui l’asseyaient par terre, oubliant le jeu, occupée à manger gravement. Un moment, elle n’entendit plus Serge, elle dut le chercher à son tour. Et ce fut pour elle une surprise, presque une fâcherie, de le découvrir sous un prunier, un prunier qu’elle-même ne savait pas là, et dont les prunes mûres avaient une délicate odeur de musc. Elle le querella de la belle façon. Voulait-il donc tout avaler, qu’il n’avait soufflé mot ? Il faisait la bête, mais il avait le nez fin, il sentait de loin les bonnes choses. Elle était surtout furieuse contre le prunier, un arbre sournois qu’on ne connaissait seulement pas, qui devait avoir poussé dans la nuit, pour ennuyer les gens. Serge, comme elle boudait, refusant de cueillir une seule prune, imagina de secouer l’arbre violemment. Une pluie, une grêle de prunes tomba. Albine, sous l’averse, reçu des prunes sur les bras, des prunes dans le cou, des prunes au beau milieu du nez. Alors, elle ne put retenir ses rires ; elle resta dans ce déluge, criant : Encore ! encore ! amusée par les balles rondes qui rebondissaient sur elle, tendant la bouche et les mains, les yeux fermés, se pelotonnant à terre pour se faire toute petite.

Matinée d’enfance, polissonnerie de galopins lâchés dans le Paradou. Albine et Serge passèrent là des heures puériles d’école buissonnière, à courir, à crier, à se taper, sans que leurs chairs innocentes eussent un frisson. Ce n’était encore que la camaraderie de deux garnements, qui songeront peut-être plus tard à se baiser sur les joues, lorsque les arbres n’auront plus de dessert à leur donner. Et quel joyeux coin de nature pour cette première escapade ! Un trou de feuillage, avec des cachettes excellentes. Des sentiers le long desquels il n’était pas possible d’être sérieux,