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herche, que l’envie de voir reprenait, avait moins de hâte. Il était debout devant la teinturerie, il causait avec la concierge, sortie un instant sur le seuil de la pièce qu’elle occupait, au rez-de-chaussée.

— Ma pauvre Françoise, vous devriez venir avec nous. Une femme seule, c’est terrible, au milieu de ces abominations !

Elle leva ses bras tremblants.

— Ah ! monsieur, bien sûr que j’aurais filé, sans la maladie de mon petit Auguste… Entrez donc, monsieur, vous le verrez.

Il n’entra pas, mais il allongea le cou et il hocha la tête, en apercevant le gamin dans un lit très blanc, la face empourprée de fièvre, et qui regardait fixement sa mère de ses yeux de flamme.

— Eh bien ! mais, reprit-il, pourquoi ne l’emportez-vous pas ? Je vous installerai à Sedan… Enveloppez-le dans une couverture chaude et venez avec nous.

— Oh ! non, monsieur, ce n’est pas possible. Le médecin a bien dit que je le tuerais… Si encore son pauvre père était en vie ! Mais nous ne sommes plus que tous les deux, il faut que nous nous conservions l’un pour l’autre… Et puis, ces Prussiens, ils ne vont peut-être pas faire du mal à une femme seule et à un enfant malade.

Weiss, à cet instant, reparut, satisfait d’avoir tout barricadé chez lui.

— Là, pour entrer, il faudra casser tout… Maintenant, en route ! et ça ne va guère être commode, filons contre les maisons, si nous voulons ne rien attraper.

En effet, l’ennemi devait préparer une nouvelle attaque, car la fusillade redoublait et le sifflement des obus ne cessait plus. Deux déjà étaient tombés sur la route, à une centaine de mètres ; un autre venait de s’enfoncer dans la terre molle du jardin voisin, sans éclater.

— Ah ! dites donc, Françoise, reprit-il, je veux l’em-