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pour Marie, me sont comme adressées ; on retient le bruit des voix & des pas, on interroge, on répond avec affection, on évite les sensations aiguës & douloureuses, & moi, je crois, par instants, que toutes ces bonnes précautions sont prises pour ne pas faire éclater mon pauvre être plein de souffrance. Je m’imagine que je me meurs, que l’on me soigne ; je prends ma part des soins, des consolations ; je vole à Marie une moitié de son agonie & des pitiés qu’elle fait naître ; je viens là, au côté d’une enfant mourante, profiter des regrets & des tendresses que les hommes accordent aux heures dernières d’une âme. Je guéris mon amour dans la mort.

Je le sens, c’est le besoin d’être plaint, d’être caressé qui me pousse dans cette chambre. J’y trouve l’air qu’il me faut, la pitié qui m’est nécessaire. La vie est trop aiguë pour ma chair endolorie & mon cœur blessé ; le grand jour m’irrite, je ne suis à l’aise que dans l’effacement répara-