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LES ROUGON-MACQUART.

devant l’autel, très-embarrassés, ne sachant pas quand il fallait s’agenouiller, se lever, s’asseoir, attendaient un geste du clerc. Les témoins, pour être convenables, se tenaient debout tout le temps ; tandis que maman Coupeau, reprise par les larmes, pleurait dans le livre de messe qu’elle avait emprunté à une voisine. Cependant, midi avait sonné, la dernière messe était dite, l’église s’emplissait du piétinement des sacristains, du vacarme, des chaises remises en place. On devait préparer le maître-autel pour quelque fête, car on entendait le marteau des tapissiers clouant des tentures. Et, au fond de la chapelle perdue, dans la poussière d’un coup de balai donné par le bedeau, le prêtre à l’air maussade promenait vivement ses mains sèches sur les têtes inclinées de Gervaise et de Coupeau, et semblait les unir au milieu d’un déménagement, pendant une absence du bon Dieu, entre deux messes sérieuses. Quand la noce eut de nouveau signé sur un registre, à la sacristie, et qu’elle se retrouva en plein soleil, sous le porche, elle resta un instant là, ahurie, essoufflée d’avoir été menée au galop.

— Voilà ! dit Coupeau, avec un rire gêné.

Il se dandinait, il ne trouvait rien là de rigolo. Pourtant, il ajouta :

— Ah bien ! ça ne traîne pas. Ils vous envoient ça en quatre mouvements… C’est comme chez les dentistes : on n’a pas le temps de crier ouf ! ils marient sans douleur.

— Oui, oui, de la belle ouvrage, murmura Lorilleux en ricanant. Ça se bâcle en cinq minutes et ça tient bon toute la vie… Ah ! ce pauvre Cadet-Cassis, va !

Et les quatre témoins donnèrent des tapes sur les épaules du zingueur qui faisait le gros dos. Pendant ce temps, Gervaise embrassait maman Coupeau,