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III

Gervaise ne voulait pas de noce. À quoi bon dépenser de l’argent ? Puis, elle restait un peu honteuse ; il lui semblait inutile d’étaler le mariage devant tout le quartier. Mais Coupeau se récriait : on ne pouvait pas se marier comme ça, sans manger un morceau ensemble. Lui, se battait joliment l’œil du quartier ! Oh ! quelque chose de tout simple, un petit tour de balade l’après-midi, en attendant d’aller tordre le cou à un lapin, au premier gargot venu. Et pas de musique au dessert, bien sûr, pas de clarinette pour secouer le panier aux crottes des dames. Histoire de trinquer seulement, avant de revenir faire dodo chacun chez soi.

Le zingueur, plaisantant, rigolant, décida la jeune femme, lorsqu’il lui eut juré qu’on ne s’amuserait pas. Il aurait l’œil sur les verres, pour empêcher les coups de soleil. Alors, il organisa un pique-nique à cent sous par tête, chez Auguste, au Moulin-d’Argent, boulevard de la Chapelle. C’était un petit marchand de vin dans les prix doux, qui avait un bastringue au fond de son arrière-boutique, sous les trois acacias de sa cour. Au premier, on serait parfaitement bien. Pendant dix jours, il racola des convives, dans la maison de sa sœur, rue de la Goutte-d’Or : M. Madinier,