Page:Zola - Germinal.djvu/69

Cette page a été validée par deux contributeurs.
69
GERMINAL.

accusait de mal nettoyer la sienne. Ils ne se détendirent un peu que dans la baraque, où le feu brûlait toujours. Même on avait dû trop le charger, car le poële était rouge, la vaste pièce sans fenêtre semblait en flammes, tellement les reflets du brasier saignaient sur les murs. Et ce furent des grognements de joie, tous les dos se rôtissaient à distance, fumaient ainsi que des soupes. Quand les reins brûlaient, on se cuisait le ventre. La Mouquette, tranquillement, avait rabattu sa culotte pour sécher sa chemise. Des garçons blaguaient, on éclata de rire, parce qu’elle leur montra tout à coup son derrière, ce qui était chez elle l’extrême expression du dédain.

— Je m’en vais, dit Chaval qui avait serré ses outils dans sa caisse.

Personne ne bougea. Seule, Mouquette se hâta, s’échappa derrière lui, sous le prétexte qu’ils rentraient l’un et l’autre à Montsou. Mais on continuait de plaisanter, on savait qu’il ne voulait plus d’elle.

Catherine, cependant, préoccupée, venait de parler bas à son père. Celui-ci s’étonna, puis il approuva d’un hochement de tête ; et, appelant Étienne pour lui rendre son paquet :

— Écoutez donc, murmura-t-il, si vous n’avez pas le sou, vous aurez le temps de crever avant la quinzaine… Voulez-vous que je tâche de vous trouver du crédit quelque part ?

Le jeune homme resta un instant embarrassé. Justement, il allait réclamer ses trente sous et partir. Mais une honte le retint devant la jeune fille. Elle le regardait fixement, peut-être croirait-elle qu’il boudait le travail.

— Vous savez, je ne vous promets rien, continua Maheu. Nous en serons quittes pour un refus.

Alors, Étienne ne dit pas non. On refuserait. Du reste, ça ne l’engageait point, il pourrait toujours s’éloigner,