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GERMINAL.

déjà se terminait. Toute espérance de secours s’en était allée, personne ne les savait là, personne n’avait le pouvoir d’y descendre, et la faim les achèverait, si l’inondation leur faisait grâce. Une dernière fois, ils avaient eu la pensée de battre le rappel ; mais la pierre était restée sous l’eau. D’ailleurs, qui les entendrait ?

Catherine, résignée, avait appuyé contre la veine sa tête endolorie, lorsqu’un tressaillement la redressa.

— Écoute ! dit-elle.

D’abord, Étienne crut qu’elle parlait du petit bruit de l’eau montant toujours. Il mentit, il voulut la tranquilliser.

— C’est moi que tu entends, je remue les jambes.

— Non, non, pas ça… Là-bas, écoute !

Et elle collait son oreille au charbon. Il comprit, il fit comme elle. Une attente de quelques secondes les étouffa. Puis, très lointains, très faibles, ils entendirent trois coups, largement espacés. Mais ils doutaient encore, leurs oreilles sonnaient, c’étaient peut-être des craquements dans la couche. Et ils ne savaient avec quoi frapper pour répondre.

Étienne eut une idée.

— Tu as les sabots. Sors les pieds, tape avec les talons.

Elle tapa, elle battit le rappel des mineurs ; et ils écoutèrent, et ils distinguèrent de nouveau les trois coups, au loin. Vingt fois ils recommencèrent, vingt fois les coups répondirent. Ils pleuraient, ils s’embrassaient, au risque de perdre l’équilibre. Enfin, les camarades étaient là, ils arrivaient. C’était un débordement de joie et d’amour qui emportait les tourments de l’attente, la rage des appels longtemps inutiles, comme si les sauveurs n’avaient eu qu’à fendre la roche du doigt, pour les délivrer.

— Hein ! criait-elle gaiement, est-ce une chance que j’aie appuyé la tête !