Page:Zola - Germinal.djvu/56

Cette page a été validée par deux contributeurs.
56
LES ROUGON-MACQUART.

dans ses rapports avec les ouvriers. Il était vêtu comme eux, barbouillé comme eux de charbon ; et, pour les réduire au respect, il montrait un courage à se casser les os, passant par les endroits les plus difficiles, toujours le premier sous les éboulements et dans les coups de grisou.

— Nous y sommes, n’est-ce pas ? Dansaert, demanda-t-il.

Le maître-porion, un Belge à face épaisse, au gros nez sensuel, répondit avec une politesse exagérée :

— Oui, monsieur Négrel… Voici l’homme qu’on a embauché ce matin.

Tous deux s’étaient laissés glisser au milieu de la taille. On fit monter Étienne. L’ingénieur leva sa lampe, le regarda, sans le questionner.

— C’est bon, dit-il enfin. Je n’aime guère qu’on ramasse des inconnus sur les routes… Surtout, ne recommencez pas.

Et il n’écouta point les explications qu’on lui donnait, les nécessités du travail, le désir de remplacer les femmes par des garçons, pour le roulage. Il s’était mis à étudier le toit, pendant que les haveurs reprenaient leurs rivelaines. Tout d’un coup, il s’écria :

— Dites donc, Maheu, est-ce que vous vous fichez du monde !… Vous allez tous y rester, nom d’un chien !

— Oh ! c’est solide, répondit tranquillement l’ouvrier.

— Comment ! solide !… Mais la roche tasse déjà, et vous plantez des bois à plus de deux mètres, d’un air de regret ! Ah ! vous êtes bien tous les mêmes, vous vous laisseriez aplatir le crâne, plutôt que de lâcher la veine, pour mettre au boisage le temps voulu !… Je vous prie de m’étayer ça sur-le-champ. Doublez les bois, entendez-vous !

Et, devant le mauvais vouloir des mineurs qui discu-