Page:Zola - Germinal.djvu/130

Cette page a été validée par deux contributeurs.
130
LES ROUGON-MACQUART.

buter contre la Compagnie. Elle lui parla ensuite de la visite de madame Hennebeau. Sans le dire, tous deux en étaient fiers.

— Est-ce qu’on peut descendre ? demanda Catherine du haut de l’escalier.

— Oui, oui, ton père se sèche.

La jeune fille avait sa robe des dimanches, une vieille robe de popeline gros bleu, pâlie et usée déjà dans les plis. Elle était coiffée d’un bonnet de tulle noire, tout simple.

— Tiens ! tu t’es habillée… Où vas-tu donc ?

— Je vais à Montsou acheter un ruban pour mon bonnet… J’ai retiré le vieux, il était trop sale.

— Tu as donc de l’argent, toi ?

— Non, c’est Mouquette qui a promis de me prêter dix sous.

La mère la laissa partir. Mais, à la porte, elle la rappela.

— Écoute, ne va pas l’acheter chez Maigrat, ton ruban… il te volerait et il croirait que nous roulons sur l’or.

Le père, qui s’était accroupi devant le feu, pour sécher plus vite sa nuque et ses aisselles, se contenta d’ajouter :

— Tâche de ne pas traîner la nuit sur les routes.

Maheu, l’après-midi, travailla dans son jardin. Déjà il y avait semé des pommes de terre, des haricots, des pois ; et il tenait en jauge, depuis la veille, du plant de choux et de laitue, qu’il se mit à repiquer. Ce coin de jardin les fournissait de légumes, sauf de pommes de terre, dont ils n’avaient jamais assez. Du reste, lui s’entendait très bien à la culture et obtenait même des artichauts, ce qui était traité de pose par les voisins. Comme il préparait sa planche, Levaque justement vint fumer une pipe dans son carré à lui, en regardant des romaines que Bouteloup avait plantées le matin ; car, sans le cou-