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LES ROUGON-MACQUART.

C’était la commune histoire des promiscuités du coron, les garçons et les filles pourrissant ensemble, se jetant à cul, comme ils disaient, sur la toiture basse et en pente du carin, dès la nuit tombée. Toutes les herscheuses faisaient là leur premier enfant, quand elles ne prenaient pas la peine d’aller le faire à Réquillart ou dans les blés. Ça ne tirait pas à conséquence, on se mariait ensuite, les mères seules se fâchaient, lorsque les garçons commençaient trop tôt, car un garçon qui se mariait ne rapportait plus à la famille.

— À ta place, j’aimerais mieux en finir, reprit la Pierronne sagement. Ton Zacharie l’a déjà emplie deux fois, et ils iront plus loin se coller… De toute façon, l’argent est fichu.

La Maheude, furieuse, étendit les mains.

— Écoute ça : je les maudis, s’ils se collent… Est-ce que Zacharie ne nous doit pas du respect ? Il nous a coûté, n’est-ce pas ? eh bien ! il faut qu’il nous rende, avant de s’embarrasser d’une femme… Qu’est-ce que nous deviendrions, dis ? si nos enfants travaillaient tout de suite pour les autres ? Autant crever alors !

Cependant, elle se calma.

— Je parle en général, on verra plus tard… Il est joliment fort, ton café : tu mets ce qu’il faut.

Et, après un quart d’heure d’autres histoires, elle se sauva, criant que la soupe de ses hommes n’était pas faite. Dehors, les enfants retournaient à l’école, quelques femmes se montraient sur les portes, regardaient madame Hennebeau, qui longeait une des façades, en expliquant du doigt le coron à ses invités. Cette visite commençait à remuer le village. L’homme de la coupe à terre s’arrêta un moment de bêcher, deux poules inquiètes s’effarouchèrent dans les jardins.

Comme la Maheude rentrait, elle buta dans la Levaque, qui était sortie pour sauter au passage sur le docteur