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milliards de pauvres d’affamés, de révoltés, à la conquête de la vérité et de la justice. Il ne s’est pas fait, dans l’histoire, un seul pas en avant, sans que ce soit le nombre qui ait poussé l’humanité en sa marche. Demain, comme hier, sera conquis par le pullulement des foules, en quête du bonheur. Et ce seront les bienfaits attendus de notre âge, l’égalité économique obtenue enfin ainsi que l’a été l’égalité politique, la juste répartition des richesses rendue désormais facile, le travail obligatoire rétabli dans sa nécessité glorieuse. Il n’est pas vrai qu’il soit imposé aux hommes en châtiment du péché, il est au contraire un honneur, une noblesse, le plus précieux des biens, la joie, la santé, la force, l’âme même du monde, qui toujours est en labeur, en création du futur. C’est du travail que l’enfant mis au monde, c’est du travail que la vie vécue normalement, sans perversion imbécile, le rythme même de la grande besogne quotidienne qui emporte le monde à l’éternité de son destin. Et la misère, le crime social abominable, disparaîtra, dans cette glorification du travail, dans cette distribution entre tous de l’universelle tâche, chacun ayant accepté sa part légitime de devoirs et de droits. Et que des enfants poussent, ils ne seront que des instruments de richesse, des accroissements du capital humain, d’existence libre et heureuse, sans que les enfants des uns puissent être de la chair à corvée, à boucherie ou à prostitution, pour l’égoïsme des enfants des autres. Et c’est la vie encore qui aura vaincu la renaissance de la vie honorée, adorée, de cette religion de la vie, écrasée sous le long, l’exécrable cauchemar du catholicisme, dont les peuples à deux reprises déjà, au quinzième siècle, au dix-huitième, ont essayé violemment de se délivrer, et qu’ils chasseront enfin, le jour prochain où la terre féconde, la femme féconde redeviendront le culte, la toute-puissance et la souveraine beauté.