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un Froment à coup sûr, ayant les yeux clairs, le haut front en forme de tour. Mathieu jeune revivait en lui, tel que le représentait un portrait conservé pieusement dans la famille, à vingt-sept ans, lorsqu’il avait commencé la conquête de Chantebled.

Alors, Mathieu, tremblant, se leva, tandis que Marianne souriait, divinement, ayant compris avant tous les autres.

« Qui donc es-tu, mon enfant, toi qui m’appelles grand-père et qui me ressembles comme un frère ?

— Je suis Dominique, le fils aîné de votre fils Nicolas, qui vit, avec ma mère Lisbeth, au vaste pays libre, dans l’autre France.

— Et quel âge as-tu ?

— J’aurai vingt-sept ans en août prochain, lorsque, là-bas, les eaux du Niger, le bon géant, reviendront féconder nos champs immenses.

— Et, dis-nous, es-tu marié, as-tu des enfants ?

— J’ai pris pour femme une Française, née au Sénégal, et déjà dans notre maison de briques, que j’ai bâtie, quatre enfants poussent, sous le soleil enflammé du Soudan.

— Et, dis-nous encore, as-tu des frères, as-tu des sœurs ?

— Mon père Nicolas et Lisbeth ma mère ont eu dix-huit enfants, dont deux sont morts. Nous sommes seize, neuf garçons et sept filles. »

Mathieu eut un bon rire de gaieté, comme pour dire que son fils Nicolas, à cinquante ans, était un vaillant ouvrier de la vie, ayant même œuvré mieux que lui. Il regarda Marianne, qui, elle aussi, riait de ravissement.

« Alors, mon enfant, puisque tu es le fils de mon fils Nicolas, viens nous embrasser, pour fêter nos noces. Et l’on va mettre ton couvert, tu es chez toi ».

Dominique, en quatre enjambées, dut faire le tour de la table. Il serra de ses bras solides, il baisa les deux