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Et il s’était attiré cette réponse de Rose, excitée, emportée dans sa fièvre heureuse, comme insensible au cinglement de la pluie :

« Bah ! maintenant, nous sommes trempés. C’est en nous arrêtant, que nous prendrions du mal… Filons ! filons ! en trois minutes nous sommes chez nous, et nous nous moquerons de tous ces traînards, quand ils arriveront dans un grand quart d’heure. »

Ils venaient de franchir le pont de l’Yeuse, ils volaient côte à côte, bien que la route se fît dure, une montée d’un bon kilomètre, entre les hauts peupliers.

« Je vous assure que nous avons tort, répéta-t-il. On me grondera, on aura raison.

— Ah ! bien ! cria-t-elle, moi qui m’amuse tant ! C’est très drôle, ce bain à bicyclette !… Laissez-moi, si vous ne m’aimez pas assez pour me suivre. »

Il la suivit, se serra contre elle, tâcha de la protéger un peu contre la pluie oblique. Et ce fut une course éperdue, une course démente, ce couple ainsi lié, dont les coudes se touchaient, filant à une vitesse folle, comme soulevé, emporté par toute cette eau galopante, hurlante, qui faisait rage. Il semblait que l’orage les charriât avec son tonnerre. Au moment où ils sautaient de machine, dans la cour de la ferme, l’averse cessa tout d’un coup, le ciel redevint bleu.

Rose riait follement, très rouge, essoufflée, mouillée à un tel point, que ses vêtements, ses cheveux, ses mains ruisselaient, une fée des sources qui aurait renversé son urne sur elle.

« Hein ? la fête est complète !… Ça n’empêche pas que nous arrivons les premiers. »

Elle se sauva, monta se peigner et changer de robe. Mais ce qu’elle n’avoua pas, ce fut qu’elle ne prit pas même la peine de mettre du linge sec, pour gagner quelques minutes, dans la hâte où elle était de préparer