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n’était pas là non plus. Il n’y avait en haut que Mlle Andrée, avec son fiancé. Les deux visiteurs montèrent.

« Comment ! on vous laisse tout seuls ? cria Mathieu, en les apercevant assis côte à côte, sur un étroit canapé, au fond de la vaste salle du premier étage.

— Mais oui, nous sommes tout seuls dans la maison, répondit Andrée avec un beau rire. Nous sommes bien contents. »

Ils étaient adorables, ainsi serrés l’un contre l’autre, elle si douce, si tendrement jolie, lui d’un charme d’homme fort, dont la grâce surtout avait vaincu. Ils s’étaient plaisamment donné le bras, tout en restant assis, comme s’ils allaient se lever, pour entreprendre ainsi, au bras l’un de l’autre, leur long voyage.

« Céleste est là, au moins ?

— Non, pas même Céleste ! Elle a disparu, nous ne savons pas ou elle est. »

Et de rire, et d’être gais comme des oiseaux libres et jaseurs, lâchés dans la fraîche solitude d’une forêt !

« Mais enfin que faites-vous là, tout seuls ?

— Oh ! nous ne nous ennuyons pas, nous avons tant de choses à faire ! D’abord, nous causons. Ensuite, nous nous regardons. Et ça dure, et jamais on n’en verrait la fin ! »

Constance les admirait, le cœur saignant. Ah ! tant de grâce, tant de santé, et tant d’espoir ! Tandis que, chez elle, le vent de stérilité avait tout brûlé, tout anéanti, la race féconde de ces Froment pullulerait donc, s’élargirait donc toujours ? Car c’était une conquête encore, ces deux enfants laissés de la sorte libres de s’aimer, seuls désormais dans cet hôtel luxueux, dont ils seraient demain les maîtres.

« Ne mariez-vous pas aussi votre fille aînée ? demanda-t-elle.