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tombé entre les mains pires de filles voraces, Séguin avait fini par commettre, aux courses, une de ces indélicatesses qu’on appelle des vols, dans le monde des honnêtes gens. Averti, du Hordel était accouru, avait payé, pour éviter l’effroyable scandale, si bouleversé de l’extraordinaire gâchis où il retrouvait la maison de son neveu, autrefois prospère, qu’il en avait éprouvé un cuisant remords, comme s’il s’était senti un peu responsable de ce qui s’y passait, depuis qu’il avait résolu de s’en écarter, par égoïsme, désireux de ne pas troubler sa paix. Mais surtout son cœur venait d’être pris par sa petite-nièce Andrée, une délicieuse enfant de dix-huit ans bientôt, bonne à marier, qui aurait suffi désormais à le retenir là, tant il était navré du dangereux abandon où il la voyait. Le père achevait de traîner sa vie au-dehors. La mère, Valentine, sortait à peine d’une crise affreuse, sa rupture définitive avec Santerre, qui, las de subir les charges du mariage sans en avoir les bénéfices, s’était décidé à épouser une vieille dame fort riche, fin logique de cet exploiteur rusé de la femme, l’âme la plus basse et la plus goulue, derrière sa pose de lettré pessimiste monnayant la sottise d’une société en décomposition. Éperdue, Valentine, à quarante-trois ans, tremblant de n’être plus aimée, s’était donnée davantage à la religion, où elle semblait avoir trouvé des consolations presque immédiates, dans la compagnie d’hommes discrets. Maintenant, elle aussi disparaissait les journées entières, on la disait la collaboratrice active du vieux comte de Navarède, président d’une œuvre de propagande catholique. Sorti de Saint-Cyr depuis trois mois, Gaston était à l’École de Saumur, dans un si beau feu de la carrière militaire, qu’il parlait déjà de rester garçon, un officier ne devant avoir d’autre amour, d’autre femme légitime, que son épée. Lucie, à dix-neuf ans, était entrée enfin chez les ursulines, où elle devait prendre