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peut vivre sans que la chair ait sa flambée de joie ? Et c’est moi la torturée, la crucifiée, car il n’est pas d’autre souffrance ! »

Des sanglots la suffoquèrent.. Mathieu lui reprit les mains, pour la calmer, bouleversé lui-même par cette clameur de détresse. Jamais il n’en avait entendu de plus douloureuse, arrachée du plus profond de l’être. Et il resta frissonnant, devant cette figure farouche du désir qui veut être infécond, et qui en meurt.

Tous deux causaient encore, lorsqu’une visite inattendue stupéfia Sérafine. C’était Constance qui s’était décidée, qui sortait justement de chez Gaude. Jamais elle ne venait ainsi, à pareille heure, rue de Marignan. Mais frappée au cœur par les paroles du chirurgien, la tête perdue, elle s’était, dehors, trouvée si seule, elle avait éprouvé un tel besoin de parler, de se soulager, qu’elle accourait là, inconsciente, toute à sa passion.

Dès la porte, elle parla fiévreusement, sans s’étonner, sans se préoccuper de la présence de Mathieu.

« Ah ! ma chère, j’avais peur de ne pas vous rencontrer… Vous savez ce qu’il vient de me dire, votre Gaude : « Madame, je ne tiens pas l’enfant sur commande. » Et il riait, et il était fort, et il était beau !… Ah ! le vilain homme !

— Je vous avais prévenue, fit remarquer Sérafine. Il s’est moqué de vous, j’en étais sûre. L’enfant sur commande, non certes ! puisqu’il le décommande ! »

Constance les jambes molles, s’était assise sur le canapé, à la place que quittait sa belle-sœur. Alors, elle conta toute sa visite, elle expliqua comment elle avait quand même obtenu de Gaude qu’il l’examinât. Et son désespoir venait de la brutalité tranquille avec laquelle il lui avait déclaré que jamais plus elle n’aurait d’enfant. Sa condamnation était formelle, des charlatans pouvaient seuls l’exploiter, en la leurrant de mensonges.