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par l’impuissance absolue du spasme ! Dans le vent qui l’avait flétrie, elle croyait entendre passer une grande voix, qui criait : « Plus d’enfant, mais plus de joie charnelle ! » Et cette joie perdue, elle la pleurait en éternelle affamée, rôdeuse inassouvie, au travers de ce petit salon poussiéreux et glacé maintenant, où jadis elle avait connu tant d’heures délirantes, noyée d’ombre chaude, ivre d’odeurs.

Elle s’arrêta brusquement devant Mathieu.

« Vous savez que j’en deviendrai folle… On dit que nous sommes plus de vingt mille châtrées à Paris. Cela doit faire un joli peuple. Je voudrais les connaître toutes, je les mènerais toutes chez Gaude, et la conversation serait drôle, n’est-ce pas ? »

Puis, se laissant de nouveau tomber sur le canapé, près de lui :

« Oh ! ce Gaude ! Vous ai-je dit que Constance m’a suppliée de la conduire à sa consultation, dans l’espoir qu’il lui ferait faire un enfant ?… Cette pauvre Constance, je la crois aussi détraquée que moi, tellement elle s’enrage à son idée de remplacer son Maurice. Elle m’a prise pour confidente, elle me raconte des choses extraordinaires, jamais je n’ai battu Paris plus éperdument, même dans mes heures de pire folie. Il faut, en vérité, que ce désir d’être mère soit aussi violent, aussi dévastateur que l’autre désir, le grand désir, le mien… Et n’importe ! c’est encore moi qui souffre le plus. Sans doute, elle lutte avec désespoir, elle essaie tout. Mais si je vous contais, moi ! l’horrible bataille que j’ai menée, en quête du plaisir perdu ! J’ai tenté l’infamie, je suis descendue aux étreintes abominables. Et rien, et jamais rien, le grand froid de la mort, même sous les brutalités… Un enfant ! elle veut un enfant ! ça se remplace, on prend un petit chien ! Mais cette nécessité vitale de contenter le désir ! Est-ce qu’on peut vivre sans nourrir le corps ? Est-ce qu’on