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vrais car ils mentaient toujours, dès qu’ils étaient de sang-froid.

« Ma chère amie, finit par répondre Beauchêne, en jouant la douleur, tu es vraiment sans pitié, veux-tu donc nous achever l’un et l’autre ? Si j’ai commis des fautes, crois bien que je les pleure amèrement… Mais, enfin, il ne faudrait pas pourtant m’accabler, mettre tout notre malheur à ma charge. Tu me reproches d’avoir couru, n’est-ce donc pas que tu m’as laissé courir ?… C’est un peu ta faute.

— Comment, ma faute !

— Certainement… Tu l’avoues toi-même, tu fermais les yeux, tu tolérais mon égarement. Ne pouvais-tu donc me retenir ? Qui te dit que des remontrances, des tendresses de ta part ne m’auraient pas corrigé ?… Vois-tu, un homme qui ne trouve pas chez lui la femme aimable, dévouée, dont il a besoin pour vivre, surtout un homme caressant comme moi, a souvent quelque excuse, lorsqu’il se dérange… C’est ta faute.

— Ma faute ! Est-ce que je me suis jamais refusée ?

— Oh ! il y a une façon de se refuser en se donnant. Ça ne se discute pas, ça se sent, cette chose-là… Enfin, puisque tu me forces à être brutal, une femme est malvenue de reprocher des maîtresses à son mari, quand elle n’a pas su faire ce qu’il fallait pour le garder tout à elle. Je ne suis pas un ange. Tu devais te livrer, m’exiger, t’arranger pour que je n’aie pas en tête d’autre idée de plaisir. »

Elle l’écoutait, indignée, hors d’elle.

« Mais c’est immonde, ce que tu me dis là ! Alors, c’est parce que tu n’avais pas assez de plaisir avec ta femme, que tu es allé en demander à toutes les filles des rues ? Et quel plaisir ? Est-ce que je sais, est-ce que je n’ai pas rempli mon devoir ? Reproche-moi d’avoir été honnête, d’avoir été propre, de n’avoir pas été une de ces