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III


L’après-midi, à l’usine, Mathieu, qui voulait quitter son travail plus tôt, ainsi qu’il l’avait promis à Marianne, pour passer chez leur propriétaire, avant d’aller dîner au restaurant, fut tellement occupé, dérangé, bousculé, qu’il entrevit à peine Beauchêne. Et ce fut un soulagement pour lui, car il restait contrarié du secret qu’un hasard lui avait fait surprendre, il craignait de l’embarrasser. Mais celui-ci, dans les quelques paroles échangées au passage, ne parut même pas se souvenir qu’il pût éprouver une gêne. Jamais il ne s’était montré si actif, si zélé pour ses affaires, se donnant de toute son intelligence, de tout son effort à la prospérité de sa maison. La fatigue du matin avait disparu, il parlait, il riait haut, en homme que le travail n’effraye pas et qui trouve la vie bonne.

Dès cinq heures et demie, Mathieu, qui d’habitude ne partait qu’à six heures, passa chez Morange, pour toucher ses appointements du mois. Ils étaient de trois cent cinquante francs. Mais, comme, en janvier, il avait pris une avance de cinq cents francs, qu’il rendait par acomptes mensuels de cinquante franc, il n’en reçut donc que trois cents. Il compta les quinze louis, les empocha d’un air de gaieté qui le fit questionner par le comptable.

— Dame ! ils arrivent à propos, j’ai laissé ce matin ma femme avec trente sous.

Il était plus de six heures déjà, lorsque Mathieu se trouva devant le superbe hôtel que les Séguin du Hordel