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des complications rares, pour qu’elle se déclarât vaincue. Les larmes de Mme Angelin redoublèrent, dans sa douleur d’être parmi ce petit nombre de maudites. Vainement, Constance s’efforça de la consoler, toute soulagée, elle, par cette consultation : des enfants à cinquante ans, encore dix ans, si elle se repentait. Et elle avait fait des signes, pour supplier la sage-femme d’être charitable, en continuant à tromper son amie.

Mme Bourdieu, quand ces dames se levèrent et qu’elle les accompagna, voulut donc rattraper son fâcheux diagnostic. À quarante-deux ans, elle avait engraissé, elle gardait sa ronde figure de gaieté, qui aidait si bien à sa fortune.

Et, avec le désir d’être aimable :

« Vous savez, chère madame, que vous étiez bâtie pour en avoir des douzaines, d’enfants. Vous avez certainement trop attendu, l’organe s’est engorgé, je soupçonne une dégénérescence. Mais j’ai eu tort tout à l’heure, il ne faut jamais se croire vaincue. Mon idée, maintenant, serait de tenter l’électricité… Revenez me voir. »

À ce moment, Mathieu et Cécile se trouvaient encore sur le palier, en grande conversation avec Norine, dont l’enfant s’était endormi comme un jésus, entre ses bras. Tous trois s’attardaient à décider la location immédiate d’une chambre, lorsque Constance et Mme Angelin parurent. Elles restèrent si surprises de le rencontrer là, en compagnie de ces deux filles, qu’elles feignirent de ne pas le voir. Mais Constance, brusquement, par un travail de mémoire reconnut Norine, n’ignorant pas que, dix ans plus tôt, il avait servi d’intermédiaire à son mari. Et ce fut, en elle, un soulèvement de révolte, une fièvre d’imaginations folles : que faisait-il dans cette maison ? de qui donc était cet enfant, que cette fille avait encore aux bras ? L’autre se dressa du passé, elle le revit au maillot comme celui-ci, elle les confondit, ne sut plus si ce n’était pas le même qu’elle avait là, sous les yeux.