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À ce moment, il y eut une joie dans la salle, Gaude parut, en dehors de ses visites réglementaires, comme il le faisait parfois, pour donner à son petit peuple obéissant de châtrées un témoignage de paternel intérêt. Il n’était accompagne que d’un interne, un gros garçon nommé Sarraille, aux yeux de ruse, dans une face basse et commune. Gaude lui, grand bel homme roux, rasé soigneusement, la figure carrée, gaie et brutale, rayonnait vraiment d’intelligence et de force, d’une autorité souveraine, avec des familiarités de bon prince qui daigne s’humaniser. Et, quand il vit qu’une de ses femmes, celle qu’il appelait « son petit bijou », pleurait ainsi, il s’avança, voulut connaître la cause de son chagrin. Puis, mis au courant, il eut un sourire d’aimable pardon.

« Vous vous consolerez, mon petit bijou. C’est une chose dont on se console très bien, vous verrez ca plus tard. »

Il ne s’était point marié, vivant en célibataire endurci, en homme infécond, qui avait, comme philosophie dernière, le parfait mépris des hommes. Moins on en faisait, mieux cela valait. Cette race d’imbéciles et de bandits pullulerait toujours assez. Il n’aurait pas fallu le pousser beaucoup, pour qu’il triomphât, à chaque femme qu’il châtrait, de la semence mauvaise qu’il écrasait dans l’œuf. Et l’on racontait ses succès d’amant prudent, parmi ses clientes, celles qui, certaines de ne plus courir de risque, jouaient avec lui, très nombreuses, disait-on, tout un sérail d’infécondes, surtout au lendemain des excitations du fer et dans la joie première de la délivrance.

Mais Mainfroy, après l’avoir pris un instant à l’écart, lui présenta la baronne de Lowicz. Il y eut des sourires, un échange d’amabilités mondaines, une entente immédiate, dès les premiers regards ; et un rendez-vous fut fixé pour la semaine suivante, chez l’illustre chirurgien.