Page:Zola - Fécondité.djvu/347

Cette page n’a pas encore été corrigée

coin du plateau marécageux et sauvage en un champ de vivante richesse. Et Séguin surtout ne tarissait pas d’élogieuses admirations, certain maintenant d’être payé, espérant déjà que Mathieu traiterait pour une nouvelle partie du domaine.

Puis, dès qu’on fut revenu à l’ancien pavillon, transformé en petite ferme, et qu’on se fut assis dans le jardin, en attendant le dîner, la conversation tomba sur les enfants. Marianne, la veille avait justement sevré Gervais ; elle lui avait donné la dernière tétée le soir ; et il était là, au milieu de ces dames, encore bien peu solide sur ses pieds, allant pourtant de l’une à l’autre d’un air gaillard, malgré les continuelles chutes qui l’étalaient sur le dos ou sur le nez. C’était un enfant gai qui ne se fâchait pas, sans doute parce qu’il se portait bien. Ses grands yeux clairs riaient, ses petites mains se tendaient amicalement, et il était très blanc, très rose, très robuste, un petit homme déjà pour ses quinze mois et demi. Le fleuve de lait avait aussi passé là, c’était la poussée heureuse de la bonne source maternelle, la floraison magnifique dans la terre où la semence avait germé. Et Constance, et Valentine l’admiraient, tandis que Marianne plaisantait, l’écartait de sa gorge, chaque fois que, de son geste familier, il allongeait ses menottes par gourmandise.

« Non, non ! monsieur, c’est fini… Vous n’aurez plus que de la soupe, maintenant.

— Ces sevrages, quelle terrible chose ! dit Constance. Est-ce qu’il vous a laissée dormir cette nuit ?

— Oh ! oui, il avait de bonnes habitudes, il ne tétait jamais la nuit. Mais c’est ce matin qu’il a été stupéfait et qu’il a commencé par crier. Vous voyez, il est assez sage déjà. Jamais je n’ai eu plus d’ennuis avec les autres. »

Beauchêne, debout, écoutait en fumant d’un air de satisfaction