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enfant avait suffi pour rendre la vie heureuse, que de gens seraient coupables de la gâter à plaisir ! Ils revinrent devant le feu, ils n’avaient que la hâte de partir, maintenant qu’ils étaient ragaillardis.

« Alors, c’est bien entendu, demanda Mathieu, vous ne voulez pas rester, pour dîner avec nous ?

— Ah ! non, par exemple ! » crièrent-ils d’une même voix.

Et, désireux de rattraper ce qu’un tel cri avait de désobligeant, Beauchêne plaisanta, accepta l’invitation pour plus tard, lorsqu’il ferait chaud.

« Parole d’honneur, nous avons une affaire à Paris… Mais je vous promets qu’à la belle saison, nous reviendrons tous passer ici une journée, oui ! avec nos femmes et nos enfants. Et vous nous montrerez vos travaux, et nous verrons bien si c’est vous qui aurez eu raison… Tous mes vœux, mon cher ! Au revoir, cousine ! Au revoir, petits, soyez sages ! »

Il y eut encore des baisers, des poignées de main, puis les deux hommes disparurent. Et, lorsque le doux silence fut retombé, Mathieu et Marianne se retrouvèrent à la même place, devant le feu clair, tandis que les enfants achevaient leur village, à grand renfort de colle, et que Gervais continuait son bon sommeil, d’un léger souffle. Avaient-ils donc rêvé ? Quel soudain coup de vent, venu des hontes et des souffrances de Paris, avait donc souillé dans leur tendre paix lointaine ? Au-dehors, la campagne gardait sa rigidité glacée. Le feu chantait seul l’espoir futur du réveil. Et brusquement Mathieu, après quelques minutes de rêverie, se mit à parler, comme s’il trouvait enfin l’explication décisive, la réponse à toutes sortes de questions graves qui se posaient depuis longtemps en lui.

« Mais ces gens-là n’aiment pas, mais ils sont incapables d’aimer ! L’argent, le pouvoir, l’ambition, le plaisir, oui ! ils peuvent ces choses, mais ils ne peuvent