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Le jour où le premier coup de pioche fut donné, Marianne vint avec Gervais aux bras, s’asseoir près des travaux, dans l’émotion heureuse de cette œuvre de foi et d’espoir que Mathieu entreprenait si hardiment. C’était par une journée claire et chaude du milieu de juin, sous un grand ciel pur d’encourageante confiance. Et comme les enfants avaient congé, ils jouaient parmi les herbes, on entendait les cris aigus de la petite Rose, qui s’amusait à poursuivre les trois garçons.

« Veux-tu donner le premier coup de pioche ? » demanda gaiement Mathieu.

Mais elle montra son nourrisson.

« Non ? non ! j’ai ma besogne… Donne-le, toi. Tu es le père. »

Il était là, avec deux hommes sous ses ordres, prêt lui-même au dur travail des bras, pour la réalisation de l’idée si longtemps discutée et mûrie. Très prudent, très sage, il s’était assuré un an d’existence modeste, tout entière vouée à l’effort, par un intelligent système d’association et de prêt remboursable sur le gain, qui, sans l’endetter, lui permettrait d’attendre la première moisson.

Et il jouait simplement sa vie sur cette moisson future, si la terre la refusait à son culte et à son travail. Mais il était le fidèle, le croyant, certain de vaincre, parce qu’il aimait et qu’il voulait. Chez lui, cette énergie créatrice s’était révélée depuis son dernier enfant avait de plus en plus