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qui ai failli mourir, et moi qui ai tant souffert, qui souffre encore, de cette malheureuse enfant, dont il est le père, je le jure bien devant Dieu !… Non, non ! c’est fini, jamais plus il ne me touchera, même du bout des doigts. J’aimerais mieux me tuer, oui ! me tuer, que de recommencer, de m’exposer de nouveau à une pareille abomination. »

C’était le cri, bégayé dans les larmes, de la femme que son mari brutalise, qui s’exaspère des tourments d’une maternité maudite, bien résolue désormais à prendre son plaisir où elle le trouverait, puisque son ménage était détruit.

Santerre, à l’écart jusque-là, paraissait attendre. Doucement, il s’approcha d’elle, osa lui prendre la main, d’un geste de tendre compassion, disant à demi-voix :

« Voyons, chère amie, calmez-vous… Vous savez bien que vous n’êtes pas seule, qu’on ne vous abandonne pas… Il y a des choses qui ne sauraient vous atteindre. Calmez-vous, ne pleurez plus, je vous en supplie. Vous me fendez l’âme. »

Il se faisait d’autant plus doux, que le mari venait de se montrer plus brutal, sachant de quelle délicieuse rosée les caresses trempent et amollissent le cœur d’une femme violentée. Sa main conquérante était remontée jusqu’au frêle poignet qu’on lui abandonnait, les pointes de ses moustaches frôlaient les petits cheveux fous des tempes. Et il se pencha davantage, l’enveloppant toute, baissant encore la voix, jusqu’à ne plus l’endormir que d’un murmure. À peine quelques mots s’entendirent.

« Vous avez bien tort de vous faire de la peine. Laissez donc ces sottises… Je vous l’ai déjà dit, ce n’est qu’un maladroit… »

Deux fois ce mot de maladroit revint, avec une sorte de pitié moqueuse ; et elle dut comprendre, car elle eut un